Chartreuse, Tarragone, reine des liqueurs depuis 1605
En 1605, le maréchal d’Estrées remet aux moines de la Chartreuse de Vauvert, à Paris, un manuscrit révélant la formule d’un « élixir » (contenant la quasi-totalité des plantes médicinales de l’époque), dont nul ne sait l’origine.
A cette époque, en effet, seuls les moines et les apothicaires possèdent les connaissances nécessaires au travail des plantes.
En 1611, le Cardinal de Richelieu remercie avec chaleur le Révérend Père de la Chartreuse de Paris; celui-ci lui avait envoyé un bézoard l’ayant soulagé d’une « fâcheuse maladie ».
(Bézoard : pierre trouvée dans l’appareil digestif de certains animaux, à laquelle on attribuait des vertus médicinales).
Trop complexe, la recette de cet élixir – surnommé « Elixir de longue vie » – semble n’avoir été que partiellement utilisée pendant plusieurs décennies à Paris.
En 1737, le Monastère de la Grande-Chartreuse (proche de la ville de Grenoble) décide d’en faire une étude exhaustive. L’apothicaire de la Grande-Chartreuse, Frère Jérôme Maubec, est chargé de cette tâche.
Il parvient à fixer définitivement la formule de ce qui devient l’Elixir Végétal de la Grande-Chartreuse.
La commercialisation de l’Elixir est alors très limitée : c’est Frère Charles qui, à dos de mulet, va le vendre sur les marchés de Grenoble et de Chambéry.
Toujours fabriqué selon les mêmes indications, cet « Elixir de longue vie » est connu aujourd’hui sous le nom de « Elixir Végétal de la Grande-Chartreuse », il titre 69°.
En 1764, la Chartreuse Verte, 55° dite « Liqueur de santé », est mise au point.
Son succès est immédiat, mais limité à la région dauphinoise.
La Révolution française de 1789 disperse les moines.
En 1793, par mesure de prudence, on fait exécuter une copie du précieux manuscrit que garde le seul religieux autorisé à rester au Monastère, un autre chartreux conservant toujours sur lui l’original.
Arrêté puis envoyé à Bordeaux, ce dernier trouve le moyen de faire passer hors de sa cellule le document à un de ses amis Dom Basile Nantas.
Convaincu que l’Ordre ne se rétablirait jamais en France, incapable lui-même de faire usage du secret, il vend la recette à un pharmacien de Grenoble, Monsieur Liotard, celui-ci ne produira jamais l’Elixir.
En 1810, l’Empereur Napoléon 1er décidant que les « remèdes secrets » doivent être soumis au ministre de l’Intérieur pour être examinés afin d’être exploités par l’Etat, Monsieur Liotard adresse le manuscrit au ministère; on le lui retourne avec la mention « Refusé », car étant déjà connu, l’Elixir ne pouvait plus être considéré comme « secret » !
A la mort de Monsieur Liotard, les documents reviennent au Monastère de la Grande-Chartreuse que les moines ont regagné en 1816.
En 1838, une nouvelle liqueur voit le jour :
la « Mélisse », dont le nom deviendra Chartreuse Blanche en 1840, qui sera produite de 1838 à 1880 et de nouveau de 1886 à 1900.
C’est en 1838 que la formule de la Chartreuse Verte sera adaptée pour produire une liqueur plus douce et moins alcoolisée, la « Chartreuse Jaune », rapidement surnommée « la Reine des Liqueurs ».
En 1903, les chartreux sont expulsés de France.
Ils emportent leur secret et implantent une distillerie à Tarragone en Espagne pour la fabrication de la liqueur.
Liqueur qu’ils fabriqueront également à Marseille dès 1921 et jusqu’en 1929, sous le nom de « Tarragone ».
Pendant cette même période, l’Etat français vend leur marque à un groupe de liquoristes qui créent la « Compagnie Fermière de la Grande Chartreuse ».
Cette société, dont la production n’a rien à voir avec la vraie Chartreuse, cesse ses activités en 1929.
Les moines retrouvent alors l’usage de l’appellation Chartreuse; ils reprennent la distillation en France, dans leur ancienne distillerie de Fourvoirie, proche du Monastère de la Grande Chartreuse.
Ces bâtiments sont détruits en 1935 par un éboulement de terrain.
La fabrication est alors transférée à VOIRON, où elle demeurera jusqu’en novembre 2017.
Depuis novembre 2017 et après 18 mois de travaux, la Distillerie d’Aiguenoire – Entre-Deux-Guiers est entrée en service.
La construction de ce nouveau site a principalement fait appel à des savoir-faire locaux (circuit court bois de chartreuse pour la charpente de la distillerie etc…), et à d’autres plus lointains notamment pour les alambics et pour les tonneaux.
Aiguenoire, ancien terrain des chartreux de 1618 à 1789, signe un véritable retour aux sources pour les liqueurs Chartreuse et constitue le second pilier du projet Grand Avenir.
Ce nouveau site de production permet aux moines chartreux de pérenniser un savoir-faire unique vieux de 400 ans, tranquillement, selon le temps long que leur impose le vieillissement de leurs liqueurs.
Différentes cuvées disponibles.
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